Charlie Wellecam - Peintre

No one is illegal, 2016, article pour mediactivist.org

" No one is illegal "

 

La situation globale des réfugiés en Europe me rappelle une entrevue de Milton Friedman, éminent économiste, datant de 1978 à Ithaca dans l'état de New York. Une personne prend la parole et lui demande, selon le modèle économique qu'il défend, ce qu'il pense de ce qui suit :

Un vieil homme de l'état du Wisconsin n'a pas pu payer ses factures d'électricité, on lui à donc coupé. Il meurt quelques temps plus tard des suites de son indigence. Supposons la véracité de cette histoire.

Tragique, certes, mais ou se situe le problème exactement ? Qui est le responsable ?

Le débat débute. Friedman, en bref, répond ceci :

« [...] la responsabilité n'incombe pas vraiment à la compagnie électrique pour avoir coupé le courant, mais sur celle des voisins, des amis et associations qui n'ont pas été assez charitables pour rendre cet homme capable de payer ses factures d'électricité. » 

 

Le véritable grand défenseur de l'humain reste la charité de celui-ci envers son prochain.

Le don de soi face à la détresse d'autrui.

 

Jo est bénévole, il vient de Devon en Angleterre.

A 17 ans, il eut un grave accident de voiture. Lorsqu'il reprit conscience, son premier contact avec la réalité, son premier souvenir, fut la main de l'infirmière empoignant la sienne. Cet acte de compassion, apparemment anodin, fut l'expérience la plus importante de sa vie. Depuis la guerre de Bosnie-Herzégovine en 1992, il a vu énormément d'images sur la détresse humaine engendrée par ce type de conflits. Cela lui prit plus de vingt ans avant de se sentir prêt pour venir aider, sa famille étant à présent indépendante.

Il a pris un billet d'avion pour venir à Lesbos, afin de pouvoir à son tour  tendre la main.

 

Tout comme Jo, ils y sont une multitude à sacrifier un mode de vie dit conventionnel pour permettre à d'autres d'y accéder. Jour après jour ils guident, informent et distribuent des produits de première nécessité, fruit du soutien de citoyens européens s'organisant sur les réseaux.

 

Lesbos, mars 2016.

 

Un pied posé sur la berge cahoteuse et l'autre encore nerveusement appuyé sur l'embarcation de fortune. Le regard est alors vissé sur le relief de la terre convoitée, sur ce qu'elle symbolise : le droit de vivre librement, décemment et en sécurité. Le coeur s'échauffe, s'emballe, tandis que les yeux s'épanchent d'une mer intérieure. Les cordes vocales chantent à l'unisson la mélopée d'une quête homérique sur le retour. Le drapeau brandi ici n'à qu'une seule couleur, scintillante sous le disque épineux de lumière.

A quelques distances de la plage ornée de dunes formées par l'amas de gilets de sauvetage, les embarcations gonflables échouées à leurs côtés, s'entremêlent les tombes de ceux qui ont vu leur voyage se terminer prématurément dans un cimetière de fortune.

D'autres barques en dur, percées de part en part sur le tapis rocailleux, leurs coques vermillon détonnant face au bleu azur des vagues venant inlassablement s'échouer à leurs bords. « Istanbul » peut on y lire, reliquat témoin d'un périple oublié, se répétant pourtant inlassablement. Les réjouissances et accolades passées, le spectre de l'indigence ne tarde pas à remontrer le bout de son nez.

 

Où aller ? Que faire ?

Les grandes nations alentours connaissent la situation de cette petite île, pourtant rien n'est fait, et cela saute aux yeux.

 

Gilets jaunes, sourires et mains tendues en signe d'accueil, on les avait vus depuis la mer, se dressant sur la côte, scrutant l'horizon de leurs jumelles, à l'affût de ceux qui traversent. Les mains s'activent pour distribuer les bouteilles d'eau et quelques fruits, un bob ou une casquette se posant sur le crâne d'un enfant. La route reprend et le long du chemin on apprend que la situation ici n'est pas aussi bonne qu'espérée. Il y a beaucoup trop de monde et trop peu de moyens. Devant le regard médusé de vacanciers de moins en moins nombreux, on se déplace le long des plages pour se rendre dans un centre d'accueil. Murs de béton et grillage en guise de couvert.

Les enfants portés à bout de bras, il faudra bien vite reprendre la route dans l'espoir de pouvoir enfin retrouver un toit.

Une couverture de survie en guise de drapeau.

                              

 

Liens utiles :

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